Paranoid
Park
Un film de Gus Van Sant
D’après le roman éponyme
de Blake Nelson
Avec Gabriel Nevins, Jaker Miller, Daniel Liu, Taylor Momsen, Lauren McKinney…
Nous avions quitté Gus Van Sant avec Last Days, évocation poétique et envoûtée des derniers jours de Kurt Cobain. Nous le retrouvons avec Paranoid Park, qui évoque un thème qui lui est cher : l’adolescence. Après Elephant, plongée sublime et abyssale dans le drame de Columbine, Paranoid Park s’attache à la culpabilité et aux errances des jeunes.
Sa caméra suit Alex, jeune adolescent de Portland, qui partage sa vie entre le lycée, sa copine Jennifer, sa famille, fragilisée par un divorce, et le skate-board, qu’il pratique avec son ami Jared. Tous les deux rêvent de pouvoir skater dans Paranoid Park, un skatepark mal famé mais incontournable.
Un soir, en compagnie d’un squatteur, il monte sur un train et tue accidentellement un agent de sécurité. La police commence alors son enquête.
Il n’est pas question de film policier dans Paranoid Park, la présence de la police s’inscrivant en filigrane. Non, il est ici sujet de la culpabilité et de son poids sur la conscience, de la manière de s’en libérer.
Stylistiquement, Paranoid Park ressemble à Elephant et Last Days, avec cette capture si particulière du sujet principal, une caméra qui scrute les regards, les moindres gestes, qui filme de dos comme une présence permanente, jusqu’à l’espace se libère et que la caméra s’éloigne peu à peu.
Un parcours de libération pour le jeune Alex, qui réalise la gravité de son geste à retardement, et qui se libère peu à peu de son crime en écrivant, en retraçant le chemin qui l’a mené puis éloigné de cet instant tragique.
Si Paranoid Park reste une œuvre intermédiaire dans la trilogie de Gus Van Sant (avec Elephant et Last Days), ce film est tout de même captivant, dans sa forme et dans son fond. Le cinéaste de cherche pas à dessiner une ligne derrière laquelle son héros bascule, mais il montre, plus généralement, que cette ligne entre bien et mal est imaginaire et que chacun navigue par moments en eaux troubles.
Très appliqué dans la forme, proche comme toujours de l’œuvre d’art contemporaine, Paranoid Park pourra choquer, le temps d’une scène, les âmes les plus sensibles, une radicalité qui peut surprendre, mais qui est filmée sans spectacularisation pour la rendre plus réelle.
Une œuvre donc qui n’est pas majeure mais qui n’est pas non plus mineure et anodine, nous sommes chez Gus Van Sant. Une ballade à suivre !
Arnaud Meunier
28/10/2007